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NOTES.

à découvert : ils seront illettrés, avides, voluptueux, inobservateurs des rites, et semblables à des taureaux sans queue ; dissipant les biens de leurs pupilles, d> et non l’ignorance ou les chagrins de ces enfans ; et les parens eux-mêmes instruiront leurs enfans dans la gourmandise, et non dans la religion. Alors y » les râdjahs seront inexorables et débauchés, mettant h mort les Brahmanes, et imposant sans cesse des tortures ou des contributions à leurs sujets, dont a plusieurs mourront de besoin, parce que la famine ravagera de temps en a temps des provinces entières ; les nuages ne répandront point de pluie, et a le sol ne rendra rien pour les semences qu’il aura reçues. Néanmoins, dans a cet âge dégradé, la misérable race humaine pourra être sauvée par une dévotion fervente envers Râm, non manifestée par des actes extérieurs, mais brûlante dans les replis du cœur.

Assurément, dit l’aigle, les maux de cet âge seront aussi terribles que le remède en sera délicieux et certain.

Heureux, dit Bhoûchanda, ceux qui l’appliqueront fidèlement ! Mais la domination de l’orgueil est plus ou moins absolue dans le cœur de l’homme. Ce péché abominable causa mes nombreuses métamorphoses et ma condamnation à une vie solitaire parmi ces rochers.

J’étois à invoquer le nom de Mahâdéo dans un de ses temples, lorsque le guide de ma jeunesse, celui qui m’instruisit dans les devoirs religieux, y entra avec une humilité sincère. Cependant telle fut l’arrogance que m’inspiroit une vaine idée de ma piété et de mon savoir, que je ne le a saluai point, et ne lui témoignai aucun respect. Il n’ouvrit point les lèvres ; ma présomption n’excita point sa colère : mais le dieu qu’il adoroit ne la supporta point aussi patiemment, et, d’une voix terrible qui retentit du haut des cieux, il prononça contre moi la sentence foudroyante d’une misère éternelle. Ce redoutable jugement plongea mon instituteur dans une angoisse douloureuse ; ses membres tremblèrent, sa langue balbutia ; et, se jetant sur la terre les mains jointes, il supplia le dieu de mitiger mon arrêt. Tant de bonté et de zèle ne pouvoit qu’apaiser son courroux ; il parla en ces termes, du sommet de Cailâs : La justice demande le châtiment de cet orgueilleux mortel ; mais il est redevable â la piété de la rémission de ses plus grandes peines. Il subira mille transmigrations ; dans toutes, il existera sans plaisir, mais non sans sagesse. Il sera un constant adorateur de Vichnou, et invoquera assidûment mon nom : il jouira aussi de l’avantage d’être aimé de tous. La mort m’ayant fait quitter la forme