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JOURNAL D’UNE DAME CRÉOLE

À de pareils spectacles, je puis à peine contenir mon indignation. Il pleurerait Antoinette comme je la pleure moi-même que peut-être lui pardonnerais-je de l’avoir enlevée à mon amour, mais profaner ainsi son souvenir auprès d’une négresse criminelle, me semble une effroyable impiété qui réclame son châtiment.

Et chaque jour ma haine s’augmente pour cet homme qui a eu l’affection de mon enfant — pour cette noire qui, en la dénonçant, a causé sa mort.

— Ah ! chère Antoinette, me dis-je, va, je te vengerai, je frapperai tes meurtriers.

Je me demande comment je pourrai châtier leur forfait. Oh ! je trouverai une torture digne du crime. Il le faut pour apaiser la chère morte. Il me semble que son ombre, ensuite, me regarderait avec moins d’horreur, qu’elle ne m’adresserait plus le reproche, qu’elle me fait en songe. Par miracle, une nuit elle est venue douce et souriante comme avant la dénonciation de Zinga. Je l’ai serrée dans mes bras et elle m’a laissé au matin son odeur délicieuse. Puisse Dieu permettre, en sa miséricorde, que je me console le soir de mes douloureuses journées, et que j’étreigne encore dans mes rêves cette grâce que je ne veux pas voir coupable ; cette grâce qui à mes yeux est toujours ingénue, toujours innocente !

FIN


« G. I. G. » Brux.
Aut. 58.16