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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS

À ce moment j’aperçus Antoinette qui venait à sa rencontre, suivie de Zozo et de Troussot.

— Arrêtez-là criai-je aux noirs.

Tous trois se jetèrent sur Zinga qui, vainement, voulut les éviter ; ils lui saisirent les mains et la poussèrent devant eux, malgré les ruades, les crachats et injures dont elle les accablait.

— Madame, dit Antoinette, cette noire est une criminelle ; vous avez mis en elle votre confiance, et elle veut vous assassiner.

Je ne répondis rien ; j’étais si surprise, si troublée que je ne savais quelle décision prendre. Mes regards allaient de Zinga, qui rugissait, la bouche écumante, les yeux féroces, — au visage d’Antoinette, pâle, décomposé, les yeux cernés comme si elle avait été malade, sa jolie robe neuve rayée de rose, toute froissée, avec une grande déchirure sur le côté, ses cheveux épars sur ses épaules, et montrant dans toute sa personne une angoisse que je ne lui avais jamais vue. Craignant que Zinga ne me parlât, Antoinette fit signe aux noirs de lui plaquer la main sur la bouche, mais comme Zinga avait été la plus forte avec moi, elle le fut cette fois encore. Elle se délivra vite des mains qui la retenaient ; seulement au lieu de fuir, elle marcha sur Antoinette, le visage résolu, le poing menaçant.

— Menteuse ! dit-elle, veux me dénoncer, mais moi, va t’accuser, et de façon que tu ne pourras rien répondre !

Puis, se tournant de mon côté :