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JOURNAL D’UNE DAME CRÉOLE

— Eh bien, je vais te donner de la mémoire, cria-t-il tout en fureur, tandis que Zinga s’adossait à une muraille, résignée à son sort, se protégeant seulement le plus qu’elle pouvait le dos et le visage. Il la battit de toute la force de son poing, frappant au hasard : les épaules, la poitrine, les hanches.

— Ah ! ah ! disait-il, je le vois bien, madame aime, madame a une passion ; le blanc l’a embagouinée ! Le devoir à présent lui importe peu. Qu’elle jouisse, la truie ; c’est tout ce qu’elle demande. Eh bien, je t’en donnerai des jouissances. Comment trouves-tu celle-là ?

Sous les coups, Zinga soupirait, sanglotait sans répondre.

— Et veux-tu me dire aussi pourquoi tu as repoussé Samuel Goring, pourquoi tu l’as frappé. Qu’est-ce qu’il t’avait fait ?

Zinga, au milieu de ses larmes, eut un cri de révolte :

— Ah ! tu ne vas pas aussi me forcer à voir cette brute-là !

— Et pourquoi donc pas ?

— Il me dégoûte, Je le déteste, je l’exècre !

— Ravale ton exécration, alors, parce que tu le verras, et pas plus tard qu’aujourd’hui. Je le veux !

— Pour l’argent qu’il me donne !

— Il ne s’agit pas d’argent. Il s’agit du bien qu’il fait à notre cause, par ses prédications.

— Je m’en fous de ses prédications, fit Zinga. Jamais il ne me touchera.