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recommandant de la donner au père Antonio, supérieur des frères mineurs réformés.

— La règle est un peu dure, mais vous avez besoin de faire pénitence.

Et comme j’hésitais :

— Finissons-en, dit-il, voulez-vous, oui ou non, que je sauve votre tête ou que je vous abandonne aux zaffi ?

Je me soumis sans enthousiasme, contraint par la nécessité. Au moment où j’allais le quitter, Coccone me rappela que je devais lui témoigner ma reconnaissance. Je lui promis de lui léguer, le jour où je prononcerais mes vœux, une partie de ma fortune, pour qu’il l’employât au service de l’Église, mais j’étais bien résolu à ne jamais tout de bon m’enfroquer.

Déjà je sortais du palais Guarini, lorsque j’entendis s’élever une violente dispute. Le bruit semblait venir de la bibliothèque de l’abbé.

— Puisque je vous affirme que le chat l’a mangé, votre macaroni, répétait une voix de jeune fille.

Mais Coccone paraissait ne rien vouloir écouter.

— C’est ce maure, ce turc, ce juif qui en est cause, faisait-il. Il ne lui suffit pas de tuer sa maîtresse, il faut encore qu’il vienne déranger son confesseur pendant son souper pour lui prendre les bouchées entre les dents. Nérina ! fermez la maison, et que personne n’interrompe le travail de votre maître. Si je n’ai pas mangé ce soir, saint Pierre ne doit pas en souffrir.

Je hâtai le pas. J’avoue que la peur d’être arrêté me tourmentait de plus en plus ; aussi je me dirigeai, sans tarder, vers le couvent des frères mineurs où m’avait adressé Coccone, et qui se trouve auprès du Ghetto.

Je craignais que les moines ne fussent endormis, de