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également la nourriture à tous ſes enfans ? Pourquoi faut-il que vous vous entre-déchiriez, & que les mamelles de votre nourrice ſoient continuellement teintes de votre ſang ? Ce qui vous révolteroit dans les animaux, vous le faites preſque depuis que vous exiſtez. Craindriez-vous de devenir trop nombreux ? Hé ! repoſez-vous ſur les maladies peſtilentielles, ſur l’inclémence des élémens, ſur vos travaux, ſur vos paſſions, ſur vos vices, ſur vos préjugés, ſur la foibleſſe de vos organes, ſur la brièveté de votre durée, du ſoin de vous exterminer. La ſageſſe de l’être à qui vous devez l’exiſtence, a preſcrit à votre population & à celle de toutes les eſpèces vivantes, des limites qui ne ſeront jamais franchies. N’avez-vous pas, dans vos beſoins, ſans ceſſe renaiſſans, aſſez d’ennemis conjurés contre vous, ſans faire une ligue avec eux ? L’homme ſe glorifie de ſon excellence ſur tous les êtres de la nature ; & par une férocité qu’on ne remarque pas même dans la race des tigres, l’homme eſt le plus terrible fléau de l’homme. Si ſon vœu ſecret étoit exaucé, bientôt il n’en reſteroit qu’un ſeul ſur toute la ſurface du globe.