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nion. Tous ſont les miniſtres, & les inſtrumens de la tyrannie. Le tyran ne peut rien par lui-même ; il n’eſt que le mobile des efforts que ſont tous ſes ſujets pour s’opprimer mutuellement. Il les entretient dans un état de guerre continuelle qui rend légitimes les vols, les trahiſons, les aſſaſſinats. Ainſi que le ſang qui coule dans ſes veines, tous les crimes partent de ſon cœur & reviennent s’y concentrer. Caligula diſoit que ſi le genre-humain n’avoit qu’une tête, il eût pris plaiſir à la faire tomber ; Socrate auroit dit, que ſi tous les crimes pouvoient ſe trouver ſur une même tête, ce ſeroit celle-là qu’il faudroit abattre.

Mais ils ſont plus heureux en Amérique, qu’ils ne l’étoient en Afrique.

Pourquoi donc ces eſclaves ſoupirent-ils ſans ceſſe après leur patrie ? Pourquoi reprennent-ils leur liberté dès qu’ils le peuvent ? pourquoi préfèrent-ils des déſerts & la ſociété des bêtes féroces à un état qui vous paroît ſi doux ? Pourquoi le déſeſpoir les porte-t-il à ſe défaire ou à vous empoiſonner ? Pourquoi leurs femmes ſe font-elles ſi ſouvent avorter, afin que