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hommes libres fut le plus conſidérable dans les contrées aſſujetties, tout le tems que les conquérans furent fidèles au gouvernement qu’ils avoient cru devoir établir, pour contenir leurs nouveaux ſujets & pour les garantir des invaſions étrangères. Mais auſſi-tôt que cette inſtitution ſingulière, qui, d’une nation ordinairement diſpersée, ne faiſoit qu’une armée toujours ſur pied, eut perdu de ſa force ; dès que les heureux rapports, qui uniſſoient les moindres ſoldats de ce corps puiſſant à leur roi ou à leur général, eurent ceſſé d’exiſter : alors ſe forma le ſyſtême d’une oppreſſion univerſelle. Il n’y eut plus de différence bien marquée entre ceux qui avoient conſervé leur indépendance & ceux qui, depuis long-tems, gémiſſoient dans la ſervitude.

Les hommes libres, ſoit qu’ils habitâſſent les villes, ſoit qu’ils vécuſſent à la campagne, ſe trouvoient placés dans le domaine du roi ou ſur les ſortes de quelque baron. Tous les poſſeſſeurs de fiefs prétendirent, dans ces tems d’anarchie, qu’un roturier, quel qu’il fût, ne pouvoit avoir que des propriétés précaires, & qui venoient origi-