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toujours juſte & infaillible, & les magiſtrats intègres comme le prince ; puiſque non-ſeulement le monarque, mais un décurion, un centenaire, un millenaire, tous ſes préposés pouvoient changer à leur gré la deſtination des peines & des récompenſes. Chez ce peuple, privé de l’avantage inappréciable de l’écriture, les loix les plus ſages n’ayant aucun principe de fiabilité, devoient s’altérer inſenſiblement, ſans qu’il reſtât aucun moyen pour les ramener à leur caractère primitif.

Les contre-poids de ces dangers ſe trouvoient dans l’ignorance abſolue des monnoies d’or & d’argent : ignorance qui rendoit impoſſible dans un deſpote Péruvien la funeſte manie de théſauriſer. Ils ſe trouvoient dans la conſtitution de l’empire, qui avoit déterminé la quotité du revenu du ſouverain, en déterminant la portion des terres qui lui appartenoient. Ils ſe trouvoient dans des beſoins peu étendus, toujours faciles à ſatiſfaire, & qui rendoient le peuple heureux & attaché à ſon gouvernement, ils ſe trouvoient dans la force des opinions religieuſes, qui faiſoient de l’obſervation des loix un principe de conſcience. Le deſpotiſme des incas étoit ainſi