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population, des manufactures, du commerce, de l’agriculture, fut ſuivie des plus grands maux. Tandis que l’Europe s’éclairoit rapidement, & qu’une induſtrie nouvelle animoit tous les peuples ; l’Eſpagne tomboit dans l’inaction & la barbarie. Les droits des anciennes douanes, qu’on avoit laiſſé ſubſiſter dans le paſſage d’une province à l’autre, furent pouſſés à l’excès, & interrompirent entre elles toute communication. Il ne fut pas permis de porter l’argent de l’une à l’autre. Bientôt on n’aperçut pas la trace d’un chemin public. Les voyageurs ſe trouvoient arrêtés au paſſage des rivières, où il n’y avoit ni pont, ni bateaux. Il n’y eut pas un ſeul canal, pas un ſeul fleuve navigable. Le peuple de l’univers, que la ſuperſtition condamne le plus à faire maigre, laiſſa tomber ſes pêcheries, & acheta tous les ans pour douze millions de poiſſon. Hors un petit nombre de bâtimens mal armés, qui étoient deſtinés pour ſes colonies, il n’y eut pas un ſeul navire national dans ſes ports. Les côtes furent en proie à l’avidité, à l’animoſité, à la férocité des Barbareſques. Pour éviter de tomber dans leurs mains, on fut obligé de