Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/47

Cette page n’a pas encore été corrigée

femmes & conversé qu’avec des eunuques, ſe trouvèrent revêtus d’une autorité ſans bornes, dont l’abus le plus inouï combla la haine & la misère de leurs ſujets, & les précipita dans la dépendance abſolue du janiſſaire devenu plus avare & plus indocile que jamais. Si le haſard conduiſit quelquefois au trône un ſouverain digne de l’occuper, il en fut chaſſé par des miniſtres, ennemis d’un maître qui pouvoit reſtreindre leur autorité & éclairer leur conduite.

Quoique le grand-ſeigneur poſſède de varies domaines, quoique la ſituation de ſes états doive l’intéreſſer aux querelles des princes Chrétiens, il n’entre preſque pour rien dans le ſyſtême général de l’Europe. C’eſt l’effet de l’ignorance du miniſtère de la Porte, de ſes préjugés, de l’immobilité de ſes principes, des autres vices qui découlent du deſpotiſme & qui perpétueront ſa mauvaiſe politique : car le grand épouvantail du tyran, c’eſt la nouveauté. Il croit que tout eſt bien ; & en effet, rien ne s’avance plus rapidement à la perfection que le deſpotiſme. Le meilleur des princes laiſſe toujours beaucoup de bien à faire à ſes ſucceſſeurs ;