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même à égaler leurs prédéceſſeurs, imaginèrent de s’ouvrir une nouvelle carrière. À des plans fortement conçus, à des idées lumineuſes & profondes, à des images pleines de nobleſſe, à des tours d’une grande énergie, à des expreſſions aſſorties à tous les ſujets, on ſubſtitua l’eſprit de ſaillie, des rapports plus ſinguliers que vrais, un contraſte continuel de mots ou de pensées, un ſtyle rompu, découſu, plus piquant que naturel ; les défauts que produit le déſir habituel de briller & de plaire. Les arts furent entraînés dans le même tourbillon ; ils furent outrés, maniérés, affectés comme l’éloquence & la poéſie. Toutes les productions du génie portèrent le même caractère de dégradation.

Elles en ſortirent, mais pour tomber dans une plus fâcheuſe encore. Les premiers hommes auxquels il fut donné de cultiver les arts, ſe propoſoient de faire des impreſſions vives & durables. Pour atteindre plus sûrement leur but, ils crurent devoir agrandir tous les objets. Cette erreur, qui étoit une ſuite preſque néceſſaire de leur inexpérience, les pouſſa à l’exagération. Ce qu’on avoit fait d’abord par ignorance, fut renou-