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paſſe des ſiècles avant l’apparition d’un orateur, d’un poète, d’un peintre, d’un ſtatuaire en qui le jugement qui compte ſes pas tempère la chaleur qui veut courir.

C’eſt principalement l’utilité qui a donné naiſſance aux lettres, & l’agrément aux beaux-arts.

Dans la Grèce, ils furent enfans du ſol même. Le Grec favorisé du plus heureux climat, avoit ſans ceſſe ſous les yeux le ſpectacle d’une nature merveilleuſe, ſoit par ſes charmes, ſoit par ſon horreur ; des fleuves rapides ; des montagnes eſcarpées ; d’antiques forêts ; des plaines fertiles ; de riantes vallées ; des coteaux délicieux ; la mer tantôt calme, tantôt agitée : tout ce qui échauffe l’âme, tout ce qui émeut & agrandit l’imagination. Imitateur ſcrupuleux, il la rendit d’abord telle qu’il la voyoit. Bientôt il mit du diſcernement entre les modèles. Les principales fonctions des membres lui en indiquèrent les vices les plus groſſiers qu’il corrigea. Il en ſentit enſuite les moindres imperfections, qu’il corrigea encore ; & ce fut ainſi qu’il s’éleva peu-à-peu au beau idéal, c’eſt-à-dire, au concept d’un être qui eſt poſſible