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pouvoir abuſer de toute ſa puiſſance. Arrêté par le ſeul nom des loix fondamentales de ſa nation, il a craint ſouvent d’en choquer les maximes. Il a ſenti qu’on avoit des droits à lui oppoſer. En un mot, il n’y a point eu de tyran, lors même qu’il n’y avoit plus de liberté.

Tels, & plus abſolus encore, ont été les gouvernemens d’Eſpagne & de Portugal, de Naples & de Piémont ; toutes les petites principautés d’Italie. Les peuples du Midi, ſoit pareſſe d’eſprit ou foibleſſe de corps, ſemblent être nés pour le deſpotiſme. L’Eſpagne avec beaucoup d’orgueil ; l’Italie, malgré tous les dons du génie, ont perdu tous les droits, toutes les traces de la liberté. Par-tout où la monarchie eſt illimitée, on ne peut aſſigner la forme du gouvernement, puiſqu’elle varie, non-ſeulement avec le caractère de chaque ſouverain, mais à chaque âge du même prince. Ces états ont des loix écrites, ont des uſages & des corps privilégiés : mais quand le légiſlateur peut bouleverſer les loix & les tribunaux ; quand ſon autorité n’a plus d’autre baſe que la force, & qu’il invoque Dieu pour ſe faire craindre,