Page:Ratel - Trois parmi les autres, 1946.djvu/265

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
255
TROIS PARMI LES AUTRES

soit arrangé. Si tu n’as pas d’appartement, tu viendras chez moi. Je retarderai mon mariage, ça n’a pas d’importance.

— Ma petite Anne, murmure Antoinette en lui prenant la tête dans ses deux mains, ma petite chérie… Tu es complètement folle. Va vite boucler ta valise.

Mais la petite se jette contre elle, l’entoure de ses bras :

— Antoinette, je ne veux pas te quitter. Je veux rester avec toi. Je t’en prie, Toine, je t’en supplie.

— Mon petit… balbutie Antoinette en fermant les yeux. Et brusquement elle se dégage et se sauve dans sa chambre, car elle a horreur de pleurer devant témoin.

Annonciade, au milieu de la pièce, s’essuie les yeux et continue à marmotter :

— Je ne veux pas… rien à faire.

Suzon, qui a le cœur sensible, se sent émue à tel point qu’elle se demande si elle doit continuer de déjeuner.

Elles n’ont plus qu’une heure devant elles pour effacer les traces de ces dernières semaines, retrouver le visage de leur amitié et vite en fixer les traits dans leur mémoire ; vite, car dans une heure il sera trop tard.

Annonciade va partir. Il faut qu’elle parte. Si elle restait, demain l’ombre de Robert recommencerait à se glisser entre elles. Demain, leurs deux