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IX

Dans un ciel au bromure, d’un violet sombre, un révélateur inconnu faisait surgir les constellations, une à une, ou par groupes ou par myriades, comme au hasard. Trois regards surveillaient la chimie céleste. Une voix chuchota, perdue dans la brise basse qui rebroussait les feuilles du marronnier :

— Penser qu’elles sont si vieilles…

— Cette lumière qui voyage pendant des milliers d’années… Nous voyons maintenant des étoiles éteintes, est-ce assez curieux ?

— Imaginez que le regard voyage comme la lumière. Les mages chaldéens qui observaient le ciel il y a des milliers d’années, peut-être que leurs regards pleuvent sur nous avec les rayons des étoiles mortes ?

— Tais-toi…

Silence. La première voix :

— Vénus, où est-elle ?

Silence. La deuxième voix :

— Elles filent trop vite. On n’a jamais le temps de faire un vœu.

La nuit régnait, si moelleuse, si dense, qu’elle semblait rayonner du cœur d’un soleil noir.

La petite scie des grillons sciait le silence sans