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LA MAISON DES BORIES

D’un commun accord, ils parlèrent d’autre chose.

Le lendemain, d’ailleurs, Amédée reçut une double lettre de ses enfants, à laquelle il fut d’autant plus sensible qu’elle semblait répondre au souhait exprimé la veille et le délivrait de sa préoccupation :


« Mon cher papa,

« Je suis bien fâché de ce que je t’ai dit hier. Je t’écris pour te dire que j’aurais bien mangé du poulet si ça n’avait pas été le Colonel, mais le Colonel je pouvais vraiment pas. Peut-être que tu comprendras et que tu voudras bien me pardonner. Maman te dira aussi qu’il aurait pas fallu tuer le Colonel, mais bien sûr c’est pas ta faute, tu pouvais pas savoir. Enfin je te demande pardon, là. Je tâcherai d’être gentil à l’avenir, comme dit Mlle Estienne et de bien travailler à l’avenir pour que les grands dépensements que tu fais pour mon instruction ne soient pas perdus. Ne fais pas de la peine à maman à cause de moi, ce n’est pas de sa faute la pauvre petite, c’est tout de la mienne. J’espère que tu vas la ramener à la maison et je t’embrasse affectueusement.

« Laurent Durras. »


« Mon cher papa,

« Je t’écris pour te dire qu’il faut pas en vouloir à Laurent, tu sais bien que c’est une espèce d’individu mais pas méchant pour un sou au fond. Moi quand il me rosse je l’appelle cochon, chameau et tout et j’ai envie de lui carpigner les z’œils pendant cinq minutes au moins et pis il m’embrasse et c’est fini. Il a bien du chagrin d’avoir été méchant et nous aussi les filles qu’on en a pleuré toute une journée au moins. Le Corbiau est même un peu malade avec la fièvre, mais Mlle Estienne lui fait de la tisane des quat’fleurs et je lui raconte des z’histoires et ça va aller très bien. Reviens vite avec maman on vous fera des