Page:Ratel - La Maison des Bories.pdf/168

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


X


Un halo brillant vibre au-dessus du champ de seigle. Les épis mûrs y trempent leurs longues barbes d’écrevisses végétales qui tâtent la lumière et frémissent de son frémissement. Le champ tout entier résonne sourdement, comme un orgue, de la rumeur des insectes cachés au plus chaud de la chaleur, dans la forêt des tiges.

Au ras du sol, plus bas que les bleuets et les nielles, régnait une température de couveuse, à faire éclater un crâne ordinaire. Mais le crâne d’une petite fille qui s’est mis en tête d’aller « prendre le frais » dans sa maison du champ de seigle n’est pas soumis aux mêmes lois qu’un crâne ordinaire.

La porte de la « maison » était fermée.

À l’intérieur, il faisait très bon. « Quelle chance d’avoir pu s’échapper sans être vue ! » Lise et Laurent avaient invité les camarades à venir voir Carl-Stéphane. Ils ne se rendaient probablement pas compte que c’était inconvenant de montrer Carl-Stéphane comme une bête curieuse, même avec toute la gentillesse et toute l’amitié du monde. Carl-Stéphane, il ne fallait le montrer à personne. C’était déjà trop de le laisser voir aux domestiques, surtout à ce sale Ludovic qui avait toujours l’air de ricaner en parlant de lui. Évidemment, il ne se rendait pas compte, le pauvre type, il ne pouvait pas imaginer un instant ce que c’était que Carl-Stéphane. C’est bien pour ça