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LE RAISIN VERT

Le Corbiau lève un visage irradié, où brillent les dents, les yeux ; une onde de sang colore ses joues mates.

— C’est Isabelle. Venez, je vais vous la montrer.

Le soleil d’Isabelle… Unir les deux soleils et qu’ils se renforcent dans la paix…

Nina fait à Isabelle une gracieuse révérence et Isabelle lui tend la main en souriant, avec un regard charmé. Les deux soleils sont en marche l’un vers l’autre.

M. Durras aussi reçoit sa révérence. Il paraît frappé d’étonnement, l’oncle Amédée, et lorsque Nina s’est éloignée, après quelques phrases caressantes sur le joli costume de la morenita et sur sa gentillesse, il suit des yeux son costume bigarré, sa taille mince et mouvante ; elle glisse parmi la foule, se perd, reparaît et se perd à nouveau, telle une couleuvre dans les herbes.

Laurent, là-bas, parlait avec animation dans le groupe de Lise et de Gisèle Denis et l’on entendait le rire aigu des petites filles.

Le Corbiau s’assit entre son oncle et sa tante et croisa ses mains sur ses genoux, si parfaitement heureuse qu’elle n’avait plus envie de danser. Elle écoutait Isabelle parler de Nina :

— Peut-on rêver plus jolie créature ? Ce teint, ces yeux, ces mouvements d’oiseau… Elle est fascinante.

« Oui, c’est cela, fascinante, » répond, en écho, une voix intérieure, avec un élan de gratitude pour celle qui ne craint pas de nommer les choses par leur nom.

Amédée craindrait-il, lui aussi, de nommer les choses par leur nom ? Il répond sans empressement, d’une voix nasale et ralentie :

— Ou… i, c’est une assez jolie fille.

— C’est une ravissante fille, reprend Isabelle avec feu. Regardez-la marcher, elle touche à peine le parquet ! Et cette petite ondulation de la taille, comme