Page:Ratel - Isabelle Comtat, Le Raisin vert, 1935.djvu/28

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

II


— Pour les petites filles, vous les mettrez où vous voudrez, je n’ai pas de préférence. Pour Laurent, ma décision est prise : il sera pensionnaire à Lakanal, qui est un excellent lycée, situé en très bon air, à Sceaux. Il aura la faculté de venir nous voir tous les dimanches, je n’en avais pas autant lorsque j’étais chez les Jésuites, à Clermont.

— Mon ami, dit Isabelle en s’efforçant au calme, vous avez fait de l’internat une expérience que vous avouez désastreuse. J’en ai fait une autre, si cruelle, que je me suis toujours promis de l’épargner à mes enfants. C’est un système contre nature où l’on n’a jamais gagné que des maladies d’estomac et de mauvaises mœurs, et je ne vois aucune raison de l’infliger à Laurent alors que nous avons un excellent collège à deux cents pas de la maison. De plus, c’est une dépense inutile alors que vous cherchez par tous les moyens à comprimer notre budget.

M. Durras fit claquer impatiemment sa langue contre son palais, rapprocha ses épais sourcils et déclara, en replongeant le nez dans ses papiers :

— Laurent sera pensionnaire à Lakanal. Un point, c’est tout. Laissez-moi travailler.

Les minces narines d’Isabelle palpitèrent. Elle parut hésiter sur ce qu’elle allait faire, puis, levant les épaules, elle sortit d’un pas rapide et regagna sa chambre, frappant de ses petits talons le parquet du vestibule carré qui unissait les deux pièces.