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organisé tout acte de révolte individuelle et irréfléchie. Nous disons à nos adversaires : nous menons une guerre contre nos ennemis pour notre patrie, pour nos frères, pour notre foi. Notre ennemi, c’est le vieux monde avec son ordre social. Nos frères, ce sont les exploités de tous les pays. Notre patrie, c’est l’union des ouvriers socialistes grandissante. Notre foi, c’est le règne de la justice, le règne du travail… Nous déclarons loyalement que notre révolution sociale détruira de fond en comble l’ordre actuel, qu’il n’y aura pas place, dans notre régime de justice et de travail, pour les gouvernements actuels, avec leurs tribunaux et leurs administrations, leurs armées et leurs mouchards ; nous supprimerons l’existence des parasites, leurs palais, leurs fêtes et leurs orgies… Nous ne suivrons pas vos règles de combat. Comme fondateurs du règne de justice, nous avons d’autres règles. Même un grand nombre de ceux qui sont hors nos rangs sont nos frères possibles et leur vie nous est précieuse. Nous sommes les partisans de la souveraineté du travail, et toute propriété non basée sur le travail nous répugne. Voilà pourquoi nous ne prêchons pas la spoliation de la propriété.

Il y a pourtant des moyens nécessaires, qu’il est impossible d’éliminer. Ils sont hors de la morale. Ces moyens ne cessent pas d’être répugnants rien que par cela que les conditions de la lutte animale avec un adversaire sans moralité les ont rendus inévitables. Une longue évolution historique a élaboré des idées morales. Les vagues notions morales du vieux monde se sont transformées en principes de morale socialiste. L’idée de la justice domine celle-ci. Ni le meurtre, ni le vol ne sauraient être des moyens moraux. En proclamant ces tristes conditions d’une lutte fatale pour des moyens moraux, nous cesserions d’être des partisans sincères de la justice. Nous serions des hypocrites, comme vous, lorsque vous parlez de l’inviolabilité de la vie humaine, de la propriété… Voilà pourquoi la justice socialisée affirme qu’elle n’a pas besoin de la vie de tel ou tel exploiteur, de la propriété de tel ou tel parasite. Elle poursuit la révolution sociale complète, la destruction universelle et complète du vieux monde, la victoire intégrale et universelle. L’heure de la révolution sociale sonnera et toutes les richesses des exploiteurs passeront à la société. Ceux qui luttent pour l’avènement du règne du travail ne sauraient vivre du vol. Ils doivent travailler eux-mêmes en limitant leurs besoins personnels.


XVII

La morale socialiste dit au combattant socialiste : Ouvrier du règne de la justice ! tu combats les principes, non les hommes. Prêche la