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SATIRE III


SATIRE III.


De mon ancien ami, j’approuve le projet ;
Oui, quoique son départ me cause un vif regret,
J’approuve que, cherchant un solitaire asile,
D’un citoyen de plus il dote la Sibylle.
Cumes conduit à Baïe, et ces lieux retirés
Semblent par la nature au repos consacrés.
Pour moi, de Prochyta le séjour misérable
Lui-même au Suburra me paraît préférable.
Quel désert, en effet, quel sauvage réduit
Plus triste qu’une ville où, tremblant jour et nuit,
On ne voit que maisons qui menacent ruine,
Qu’édifices en feu, que meurtre, que rapine,
Sans compter les auteurs dont les rauques accents
Dans la rue au mois d’août poursuivent les passants ?
Tandis que son esclave, apportant le bagage,
Sur un seul charriot range tout le ménage,
À la porte Capène il s’arrête un moment,
Au lieu même où la nuit Numa furtivement
Venait prendre conseil de sa nymphe chérie ;
Maintenant la fontaine et l’autel d’Egérie
Sont loués à des juifs qui, pour tout mobilier,
Ont la botte de paille et le panier d’osier.
Car le peuple romain des arbres de bocage
Fait à ces malheureux payer jusqu’à l’ombrage,
Et contraintes de fuir pour de vils mendiants,
Les Muses ont quitté ces asiles riants.
Je descends avec lui dans, ces grottes sacrées