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Et le combat reprend une nouvelle face.
Bientôt les agresseurs cèdent de tout côté ;
Et tandis qu’à grands pas, l’un d’eux épouvanté,
Au milieu des fuyards, court et se précipite,
Il tombe. On se saisit du malheureux Ombite ;
Avide de ronger, de dévorer ses os,
On l’entoure, on l’égorge, on le coupe en morceaux.
L’airain tarderait trop à leur faim haletante,
Et d’un cadavre crû la troupe se contente.
Du moins le feu sacré qu’à la voûte des cieux
Déroba de Japet le fils audacieux,
Ce principe immortel dont il forma notre âme,
Ne fut point profané par cette horde infâme.
Ah ! je l’en félicite, et ce bonheur, je crois,
Volusius le sent, le partage avec moi.
Ne me demandez pas si le tigre farouche
Qui porta le premier ces lambeaux à sa bouche,
Trouva quelque plaisir à ce repas affreux ;
Jamais il ne goûta rien de plus savoureux ;
Et celui qui, trompé dans sa barbare joie,
Ne put avoir sa part de l’exécrable proie,
S’attachant au gazon et du doigt le pressant,
En exprima du moins quelques gouttes de sang.

Les Vascons, direz-vous, pour prolonger leur vie,
Jadis ont eu recours à ce festin impie ?
Oui, sans doute, ils l’ont fait ; mais la haine du sort,
Mais l’horreur de céder dans une guerre à mort,
Mais les derniers malheurs d’un siège impitoyable
Semblaient justifier ce repas effroyable.
Ils avaient englouti les herbes, les troupeaux,
Et jusqu’aux ossements des plus vils animaux.
Fantômes décharnés, errant sur leurs murailles,
La rage de la faim dévorait leurs entrailles :
Elle seule poussait leurs bras désespérés :
Et, s’ils se sont nourris de ces mets abhorrés,