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Car c’est là des honneurs le chemin glorieux !
Un douzième à Gillon, et le reste à Procule ;
C’est d’après la vigueur que le legs se calcule.
Les lâches ! laissons-les trafiquer de leur sang,
Plus pâles que celui qui, d’un pied frémissant,
Foule un serpent sous l’herbe, ou que le téméraire
Qui brigue dans Lyon la palme littéraire.

Qui peindrait mon courroux quand je vois ce tuteur,
De l’enfant qu’il dépouille, avare corrupteur,
D’un troupeau de clients embarrasser la ville,
Ou quand ce Marius qu’un vain décret exile,
(Qu’importe l’infamie à qui sauve son or !)
Des dieux même irrités jouit sur son trésor,
Et, la coupe à la main, avant la huitième heure,
Se rit de l’Africain qui triomphe et qui pleure ?

Lampe de Vénusie, à des traits si honteux,
N’est-ce pas le moment de rallumer tes feux ?
Ou bien me faudra-t-il, insipide poète,
Redire le vainqueur du monstre de la Crète,
Hercule, Diomède et Dédale et son fils,
Lorsqu’à table un époux tranquillement assis,
Du rival effronté dont la flamme l’outrage,
Au défaut de sa femme espérant l’héritage,
Ronfle à dessein tout haut, et, les yeux au plafond,
Souffre complaisamment le plus sanglant affront ?
Lorsqu’un jeune insensé qui mit toute sa gloire
A briguer sur son char une indigne victoire,
Pour avoir en chevaux, en harnais précieux,
Consumé follement le bien de ses aïeux,
Et jadis en public, Automédon infâme,
Conduit le monstre impur dont Néron fit sa femme,
Croit pouvoir, par l’éclat de ses brillants exploits,
S’élever dans l’armée aux plus nobles emplois ?

Quel est ce fier Romain qui, dans sa nonchalance,
Sur six Liburniens en litière s’avance,