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De dégoût à son tour est près de déserter.
Les vins pour son palais n’ont plus la même sève,
Les mets le même goût : l’amour n’est plus qu’un rêve,
Qu’un vague souvenir qui s’efface à jamais ;
Ou si Vénus encor l’effleure de ses traits,
Son feu qui s’évapore en stériles tendresses,
Réclamerait en vain une nuit de caresses.
Que peut d’un débauché par les ans refroidi,
L’organe languissant sous la neige engourdi ?
Le vieillard sans vigueur, qu’un vain désir enflamme,
Est justement suspect de quelque goût infâme.
Autre privation. Citharistes fameux,
Chanteurs, fiers d’étaler vos manteaux fastueux,
Qu’importe qu’au théâtre il soit près de la scène,
Si les accents du cor le réveillent à peine ?
Si, quand il veut savoir ou les heures du jour,
Ou les clients venus pour lui faire la cour,
Afin de surmonter sa surdité profonde,
Il faut que son esclave à grands cris lui réponde ?
Ce n’est pas tout : son sang glacé jusqu’en son cœur,
Ne doit plus qu’à la fièvre un reste de chaleur,
Et tant de maux divers accablent sa faiblesse,
Que, s’il en fallait dire et le nombre et l’espèce,
J’aurais plus tôt compté les amants d’Hippia,
Les hommes qu’en un jour épuise Mævia,
Les fiévreux que Celsus dépêche en un automne,
Les pupilles qu’Hirrus a réduits à l’aumône,
Les jeunes gens courbés par l’infâme Hamillus,
Et les associés que vola Basilus ;
J’aurais plus tôt compté les maisons de plaisance
Où brille maintenant, au sein de l’abondance,
L’affranchi qui, jadis officieux barbier,
Sur mon poil importun faisait sonner l’acier.
L’un souffre de l’épaule et l’autre de la cuisse :
Celui-ci de la goutte endure le supplice :