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Car tout vient du hasard ; tout tient à l’influence
De l’astre sous lequel nous avons pris naissance.
La fortune fera, si telle est son humeur,
D’un rhéteur un consul, d’un consul un rhéteur.
Bassus et Tullius prouvent-ils autre chose
Qu’une puissance occulte, une invisible cause
Qui mène, qui fait tout, et change quelquefois
Les captifs en vainqueurs, les esclaves en rois ?
Sans doute il fut heureux l’homme extraordinaire
Qui, pour le consulat descendit de sa chaire ;
Mais l’histoire offre peu de ces succès brillants,
Et l’on en compterait moins que de corbeaux blancs.
Combien d’autres, entrés dans la même carrière,
Ont perdu tristement leur existence entière !
Témoin Thrasimachus ; témoin ce Carinas
Qu’Athènes vit périr et ne secourut pas,
Athènes bien plus prompte à donner la ciguë !
Puisse sur vos cercueils la terre répandue,
Ne vous point accabler d’un trop pesant fardeau !
Puisse d’un doux printemps l’aspect toujours nouveau
Ne montrer aux regards, sur vos urnes chéries,
Que rameaux odorants, que guirlandes fleuries,
Vous, antiques Romains, qui, par de saintes lois,
D’un sage gouverneur reconnaissiez les droits !
Vous qui lui remettiez l’autorité d’un père !
D’un maître rigoureux craignant la verge austère,
Achille déjà grand, du centaure Chiron,
Sur les monts paternels, répétait la leçon.
Qui n’eût ri de la queue et du maintien bizarre
D’un centaure donnant des leçons de cithare ?
De ces temps fortunés les mœurs sont loin de nous,
Et de ses écoliers Rufus reçoit des coups,
Ce Rufus qui du droit qu’un vil pédant s’arroge,
Appela tant de fois Cicéron Allobroge.

Quel père, appréciant des travaux assidus,