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Mais quelle différence à la voir par derrière !
Je le crois aisément, puisque, sans brodequin,
Ce n’est plus qu’un pygmée, un ridicule nain,
Et que, pour embrasser l’objet de sa tendresse,
Sur la pointe des pieds il faut qu’elle se dresse !
Cependant elle court au lieu du rendez-vous,
Néglige sa maison, laisse là son époux.
Avec lui désormais elle vit en voisine ;
La seule affinité, c’est qu’elle le ruine,
Et que, pour l’affliger, se croyant tout permis,
Elle bat ses valets et chasse ses amis.

Des prêtres de Bellone et des chœurs de Cybèle,
Vois-tu l’impur essaim fondre en foule chez elle ?
Vois-tu ce grand eunuque, objet de leur respect !
Le cynique troupeau s’incline à son aspect ;
Et, la tiare en tête, en avant du cortège,
Seul de régler la marche il a le privilège.
Du ton d’un inspiré dans la fourbe enhardi :
De septembre, dit-il, et des vents du midi,
Profanes, redoutez les noires influences,
A moins que par cent œufs expiant vos offenses,
Vous n’ayez désarmé la céleste rigueur,
Ou que, pour détourner quelque soudain malheur,
Le don accoutumé de vos vieilles parures,
N’ait de l’année entière effacé les souillures.
Le matin dans le Tibre, au plus fort de l’hiver,
Trois fois, malgré la glace et la rigueur de l’air,
Elle courra plonger sa tête frémissante.
De là, s’il le prescrit, demi-nue et tremblante,
Autour du champ de Mars, que son sang rougira,
Sur ses genoux meurtris elle se traînera ;
Et s’il lui dit : Partez, la blanche Io l’ordonne :
Vous la verrez, soumise à l’ordre qu’on lui donne,
D’un voyage en Égypte affrontant le péril,
Après avoir franchi les rivages du Nil,