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sais grâce à rien de ce qui passait à ma portée, gazelle ou buffle, ours et tigre, éléphant ou homme ! Mais aujourd’hui que j’ai vu, dans le profond chagrin où j’étais plongé ; aujourd’hui que j’ai vu, dans le malheur où j’étais enchaîné, les deux héros de Raghou, il n’est pas au monde un être plus heureux que moi !

« Jadis, j’étais sur la terre séduisant par ma beauté et semblable même à l’Amour ; une faute commise un jour me fit tomber dans ces formes-ci tout à fait contraires. C’est le venin d’une malédiction qui a changé mes attraits en cette difformité hideuse, repoussante, qui inspire la terreur à tous les êtres et telle enfin que vous voyez.

« Ma beauté fut célèbre dans les trois mondes, elle était au delà de toute imagination, comme si tous les charmes, partagés entre Çoukra, la lune, le soleil et Vrihaspati étaient réunis dans une seule personne. Je suis un Dânava, mon nom est Danou, je suis le fils moyen de Lakshmî, déesse de la beauté : apprends que c’est la colère d’Indra qui m’a revêtu de ces formes hideuses.

« Une terrible pénitence me rendit agréable au père des créatures : il m’accorda une longue vie en récompense, et ce don remplit mon âme d’un vain orgueil.« Maintenant qu’une longue vie m’est donnée, pensai-je, qu’est-ce qu’Indra peut me faire ? » et là-dessus je défiai Indra même au combat. Mais son bras, déchaînant sur moi sa foudre aux cent nœuds, fit rentrer dans mon corps et ma tête et mes jambes. Je le conjurai en vain de me donner la mort, il ne voulut pas m’envoyer au noir séjour d’Yama : « Non ! dit-il, que la parole de Brahma subsiste dans sa vérité ! »

« Alors, devenu ce que tu vois, rejeté hors de ma beauté, avec ma splendeur éteinte, je dis au roi des Im-