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de l’ermitage, mes yeux rouges et mes lèvres tremblantes de colère. »

Au fils de Soumitrâ, qui tenait ce langage, Râma fit cette réponse, l’esprit affolé d’inquiétude : « Tu as commis une faute, mon ami, de quitter l’ermitage et de venir. Quoiqu’elle sût bien que c’est la nécessité de réprimer les Démons qui m’oblige à me tenir ici dans ces bois, ta grandeur n’a pas craint d’en sortir à ces paroles irritées de la Mithilienne. Je ne suis pas content de toi : je n’approuve pas que tu aies délaissé ma Vidéhaine, surtout à la voix mordante d’une femme courroucée. »

À l’aspect de ce Djanasthâna, qui semblait aussi pleurer de tous les côtés, Râma dit encore, poussant des cris et levant au ciel ses deux bras luisants : « Si cachée derrière un arbre, Sîtâ, tu veux rire de mon inquiétude, que la vive douleur, où ton absence m’a jeté, noble Dame, suffise à ton badinage !… Sîtâ aime à jouer avec ces faons apprivoisés de gazelle ; mais tu ne vois point ici avec eux, Lakshmana, leur maîtresse aux grands yeux !… Ces bijoux d’or, Lakshmana, ces paillettes brisées d’or, avec cette guirlande, répandues sur la terre, ils étaient dans la parure de ma Vidéhaine !… Vois, fils de Soumitrâ ! d’affreuses gouttes de sang, pareilles à de l’or épuré, couvrent de tous côtés la surface de la terre !

« Je pense, Lakshmana, que la sainte pénitente du Vidéha, déchirée et percée de leurs dents, fut mise en pièces ou dévorée même par ces Démons habiles à changer de formes. Vois ces traces, fils de Soumitrâ ! Elles signalent ici un combat livré à cause de ma Vidéhaine, que deux Rakshasas impurs se disputaient. Que devint, hélas ! entre ces deux noctivagues, qui se battaient pour elle, son vi-