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qu’on appelle Râvana, le fléau de tous les mondes ; celui sous les ordres de qui, femme ravissante, Khara gouverne ici le Dandaka. Je suis le frère et même l’ennemi de Kouvéra, dame aux brillantes couleurs ; je suis un héros, le propre fils du magnanime Viçravas. Poulastya était le fils de Brahma, et moi, femme, je suis le petit-fils de Poulastya. J’ai reçu de l’Être existant par lui-même un don incomparable, celui de prendre à mon gré toutes les formes et de marcher aussi vite que la pensée. Ma force est renommée dans le monde : on m’appelle aussi Daçagrîva[1] ; mais le nom de Râvana est encore plus célèbre, femme au candide sourire, et je le dois à la nature de mes œuvres[2].

« Sois donc la première de mes épouses, auguste Mithilienne, sois à la tête de toutes ces femmes, mes nombreuses épouses, au plus haut rang elles-mêmes de la beauté. Ma ville capitale est nommée Lankâ, la plus belle des îles de la mer ; elle est située sur le front d’une montagne et l’Océan se répand à l’entour. Elle est ornée de hauts pitons faits d’or épuré, elle est ceinte de fossés profondément creusés, elle porte comme une aigrette de palais et de belles terrasses. Non moins célèbre dans les trois mondes qu’Amarâvatî, la cité d’Indra, c’est la capitale des Rakshasas, de qui le teint imite la couleur des sombres nuages.

« C’est une île céleste, ouvrage de Viçvakarma, et large de trente yodjanas. Là, tu pourras te promener avec moi, Sîtâ, dans ses riants bocages ; et tu n’auras plus aucun désir, noble dame, de revenir jamais habiter ces bois. »

  1. C’est-à-dire Decem habens colla.
  2. Râvana veut dire qui fait pleurer.