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de l’intelligence et qui possède les saintes traditions.

« Rappelle donc ta fermeté, ne te livre point à ce deuil ; va, taureau des hommes, va promptement habiter dans cette belle métropole, et fais de la manière que mon père te l’a commandé. Moi, de mon côté, j’accomplirai la volonté de mon noble père dans l’endroit même, que m’a prescrit ce monarque aux œuvres saintes. Il serait malséant à moi de manquer à son ordre, héros, qui domptes les ennemis ; et sa parole doit toujours être obéie par toi-même, car il est notre parent, il est plus, notre père. »

À ces mots, Bharata d’opposer à l’instant ce langage : « Combien y a-t-il d’hommes tels que toi dans le monde, invincible dompteur de tes ennemis ? Tu n’es pas troublé par la douleur et le plaisir ne pourrait même t’enivrer de sa joie : tu possèdes l’estime de tous les vieillards autant qu’Indra jouit de l’estime parmi les habitants du ciel.

« Tu possèdes une âme semblable aux âmes des Immortels, tu es magnanime, tu es fidèle à ton alliance avec la vérité même ! Le plus accablant de tous les chagrins ne peut te renverser, toi qui, doué avec de telles vertus, connais si bien ce que c’est que naître et mourir.

« Mais à moi, sage frère, à moi, séparé de toi et privé de mon père, il me sera impossible de vivre, consumé par mon chagrin, comme le daim blessé par une flèche empoisonnée ! Veuille donc agir de telle manière que je ne laisse pas ma vie dans cette forêt déserte, où j’ai vu, d’une âme désolée, un si noble prince habiter avec son épouse et Lakshmana : oui, sauve-moi ! et prends en main le sceptre de la terre ! »

Tandis qu’avec tristesse et la tête prosternée, Bharata suppliait ainsi Râma, ce maître de la terre, plein d’énergie,