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Il dit, et, chargée de sa malédiction, Kèkéyi tomba fatalement sous la domination de Mantharâ ; elle prit donc la bossue aux vues criminelles dans ses bras, la serra fortement contre son cœur ; et toute à l’excès d’une joie qui troublait sa raison, elle tint résolument ce langage à Mantharâ : « Je suis loin de mépriser ta prévoyance exquise, ô toi qui sais trouver les plus sages conseils : il n’existe pas dans ce monde une seconde femme égale à toi pour l’intelligence. »

Ainsi flattée par Kêkéyî, la bossue, pour animer davantage la reine couchée dans son lit, répondit en ces termes : « Il est superflu de jeter un pont sur un fleuve dont le canal est à sec ; lève-toi donc, illustre dame ! assure ta fortune, et mets le trouble dans le cœur du monarque ! » « Oui ! » répondit Kêkéyî, approuvant ces paroles ; et, suivant les conseils de Mantharâ, elle s’affermit dans la résolution de faire donner l’onction royale à Bharata.

La noble reine ôta son collier de perles, enrichi de précieux bijoux et de joyaux magnifiques ; elle se dépouilla de toutes ses autres parures ; et, l’âme remplie de haine par cette Mantharâ, elle entra dans la chambre de la colère, où elle s’enferma seule avec l’orgueil que lui inspirait la force de sa prospérité.

Alors, avec un visage assombri sous les nuages de sa colère excitée, ayant détaché rubans, torsades et joyaux de son buste si pur, l’épouse charmante de l’Indra des hommes devint comme le ciel enveloppé de ténèbres, quand l’astre de la lumière s’est éclipsé.