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famille restera sans grandes ressources. Aussi Mrs. Bennet est-elle bien décidée à ne pas laisser échapper cette superbe occasion de caser avantageusement une de ses enfants, et à disputer âprement le jeune millionnaire aux amies de ses filles. Elle essaie d’intéresser son mari à ses futures intrigues, mais elle ne recueille que des sarcasmes de l’ironique Mr. Bennet, qui, suivant son habitude, cherche dans sa bibliothèque un refuge contre les ineptes confidences de son épouse.

Un bal réunit les principaux personnages, fait connaître leurs caractères, et sert de point de départ au conflit qui fera l’intérêt du roman. Bingley a amené ses deux sœurs et son ami Darcy. Celui-ci accapare immédiatement toute l’attention de la petite société par sa jolie figure et sa belle prestance, surtout quand le bruit court dans la salle qu’il a deux cent cinquante mille francs de rente. Mais cet engouement ne dure guère ; le jeune homme affiche trop son antipathie pour ces bourgeois provinciaux ; il se tient à l’écart, refuse d’être introduit aux notabilités de Meryton, pour lesquelles il devient aussitôt l’homme le plus orgueilleux et le plus désagréable du monde. Comme Elisabeth, la seconde fille de Mrs. Bennet, se trouve sans cavalier, Bingley engage son ami à la faire danser ; mais Darcy répond qu’il ne la trouve pas assez jolie pour lui et qu’il ne saurait se contenter de demoiselles dédaignées par les autres. La jeune fille l’entend ; elle est spirituelle, elle rit avec ses amies de la fatuité du jeune homme, mais reste un peu froissée de son appréciation. C’est la lutte entre l’orgueil de Darcy et les préventions d’Elisabeth qui commence.

Jane, sa sœur aînée, la plus jolie fille de la société et aussi la plus indulgente aux défauts d’autrui, a été plus favorisée. Le tout Meryton, qui tient une comptabilité malicieuse des danses que les nouveaux venus daignent solliciter des demoiselles à marier, a noté qu’elle seule a été invitée deux fois par l’aimable Bingley. Mrs. Bennet