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vieille coque de noix façonnée comme ça ! Et encore il a collé dessus deux beaux messieurs qui le plus tranquillement du monde regardent les montagnes et les rochers autour d’eux, comme s’ils n’étaient pas sur le point de faire un plongeon, ce qui ne va pas tarder. Je me demande dans quel chantier ce bateau là a été construit ; » et riant de tout son cœur « je ne voudrais même pas m’aventurer sur une mare de village là-dedans [1]. »


En s’éloignant, il interrompt sa conversation avec sa jolie interlocutrice pour jeter un dernier regard au tableau et un désespéré « Seigneur quel bateau ! »

Le ton du vieux marin, passionné de son métier, n’est-il pas pris sur le vif, plein de couleur et de vérité ?

Écoutons maintenant jacasser deux jeunes filles, la naïve Catherine Morland et la flirteuse Isabella Thorpe, dans la salle de bal d’une ville d’eaux.


— « Au nom du ciel ! » interrompit Isabella, « quittons ce coin. Savez-vous que deux jeunes insolents me fixent depuis une demi-heure. Ils me font vraiment perdre contenance. Allons voir la liste des arrivées. Ils n’oseront pas nous suivre jusque là ».

Elles se dirigèrent vers le livre, et, pendant qu’Isabella déchiffrait les noms, Catherine eut à surveiller les manœuvres de ces inquiétants personnages.

— « Ils ne viennent pas par ici, n’est-ce pas ? J’espère qu’ils n’ont pas l’impertinence de nous suivre. Je vous en prie, dites-moi s’ils viennent ? Je ne veux pas lever la tête ».

Bientôt Catherine, avec une joie non affectée, put affirmer à son amie qu’elle n’avait plus lieu de se sentir gênée, car les jeunes gens avaient quitté la salle.

— « Et de quel côté sont-ils partis ? » demanda Isabella en se retournant vivement. « Il y en avait un qui était très bien ».

— « Du côté de l’église ».

  1. Persuasion.