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vie de province pour travailler, lire ou réfléchir, qui trompent par des bavardages ineptes ou méchants l’ennui des longues heures monotones, qui dans le vide de leurs pensées, sont toujours affairées, font des catastrophes de petits incidents, de noirs complots de saints non rendus et d’invitations oubliées, rabaissent leurs maris à leur niveau, étouffent les bonnes dispositions de leurs enfants. Si Mrs. Bennet met tout son orgueil à voir ses filles mariées avant celles de ses concurrentes, ce n’est pas par amour maternel ; c’est qu’elle est persuadée que leur mariage dépend exclusivement de la diplomatie de la mère, et qu’elle doit en récolter la gloire. Mais il y a des diplomates très compromettants ; et les deux filles aînées de Mrs. Bennet ont fort à faire pour réparer ses maladresses qui mettent les gendres en fuite au lieu de les attirer.

Comme elle-même doit s’ennuyer avec Mr. Bennet (si les commérages lui en laissent le temps). Elle aurait été si heureuse avec un mari dans le genre de Mr. Collins. Celui-là l’aurait écoutée, aurait discuté avec elle, gravement et sentencieusement, les potins du village ; il aurait même exigé des détails complémentaires, afin d’en faire un rapport plus achevé à la digne et curieuse Lady Catherine de Bourgh. Car, Mr. Collins, c’est le pasteur à l’esprit étroit, qui se gonfle de l’importance de son office, ne néglige aucune occasion de moraliser ses inférieurs et de s’aplatir devant les favorisés de la fortune. Son respect pour le haut rang de Lady Catherine de Bourgh, joint à son excellente opinion de lui-même, de son autorité et de ses droits de recteur, en font un curieux mélange d’orgueil et d’obséquiosité, de prétention et d’humilité. Quel air important il prend quand il dîne chez Lady Catherine de Bourgh ! « Il occupe la place d’honneur au bout de la table, et son expression montre que pour lui, la vie ne peut rien offrir déplus élevé ; et il découpe, mange, et prodigue les louanges avec