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Après Mansfield Park, Jane Austen sentit probablement le besoin de rasséréner son public et elle donna un roman plein de gaîté. On rencontre quelques sots, des fats et des étourdis dans Emma ; on n’y trouve ni vicieux ni méchants, pas une scène pénible, aucune peinture déprimante, et les haines et les jalousies s’éteignent bien vite dans le comique des méprises réciproques.

Emma Woodhouse,la plus riche héritière de Highbury, a été, toute jeune, maîtresse de maison, par suite du décès de sa mère, du mariage de sa sœur aînée et de l’état de santé de son père. Admirée et gâtée par son entourage, elle a une haute opinion d’elle-même, et n’admet ni la critique ni l’opposition. Seul, Mr. Knightley, un vieux garçon de trente-six ans, dont le frère a épousé la sœur aînée d’Emma, ose quelquefois ne pas être de son avis. Elle vient de marier sa gouvernante, une charmante jeune femme, avec un de leurs amis Mr. Weston, veuf sympathique et riche. Les nouveaux époux lui sont si reconnaissants, qu’Emma ne peut pas s’arrêter en si bonne voie et projette de faire d’autres heureux. On vient justement de lui présenter Harriet Smith, fille naturelle d’un inconnu qui l’a confiée à la directrice du petit pensionnat de Highbury. C’est une jolie jeune fille de dix-sept ans, pleine de naïveté. Emma va la former, faire son éducation mondaine, et surtout lui trouver un mari. Un mari riche naturellement, car un mari honnête et affectueux, Harriet n’a pas besoin de le chercher bien loin ; Mr. Martin, le frère de deux camarades de pension lui fait une cour discrète. Mais ce n’est qu’un fermier ; Emma a en vue quelque chose de mieux ; Mr. Elton, le jeune et élégant pasteur, dont les vieilles filles collectionnent les sermons et qui fait courir les jeunes aux fenêtres pour le regarder passer. Unir le phénix du village