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Dépendent les destins de l'empire ottoman.

Qu'as-tu vu dans l'armée, et que fait le sultan?

Osmin

Babylone, Seigneur, à son prince fidèle,

Voyait sans s'étonner notre armée autour d'elle;

Les Persans rassemblés marchaient à son secours,

Et du camp d'Amurat s'approchaient tous les jours.

Lui-même, fatigué d'un long siège inutile,

Semblait vouloir laisser Babylone tranquille,

Et sans renouveler ses assauts impuissants,

Résolu de combattre, attendait les Persans.

Mais, comme vous savez, malgré ma diligence,

Un long chemin sépare et le camp et Byzance;

Mille obstacles divers m'ont même traversé,

Et je puis ignorer tout ce qui s'est passé.

Acomat

Que faisaient cependant nos braves janissaires?

Rendent-ils au sultan des hommages sincères?

Dans le secret des cœurs, Osmin, n'as-tu rien lu?

Amurat jouit-il d'un pouvoir absolu?

Osmin

Amurat est content, si nous le voulons croire,

Et semblait se promettre une heureuse victoire.

Mais en vain par ce calme il croit nous éblouir:

Il affecte un repos dont il ne peut jouir.

C'est en vain que forçant ses soupçons ordinaires,

Il se rend accessible à tous les janissaires:

Il se souvient toujours que son inimitié

Voulut de ce grand corps retrancher la moitié,

Lorsque pour affermir sa puissance nouvelle,

Il voulait, disait-il, sortir de leur tutelle.

Moi-même j'ai souvent entendu leurs discours:

Comme il les craint sans cesse, ils le craignent toujours.

Ses caresses n'ont point effacé cette injure;

Votre absence est pour eux un sujet de murmure:

Ils regrettent le temps, à leur grand cœur si doux,

Lorsque assurés de vaincre ils combattaient sous vous.

Acomat