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zo8 M ITH R I D AT E ;

A l'afpefk de ce front , dont la noble fureur

Tant de fois , dans leurs rangs, répandit la terreur ,

Vous les eulTicz vus tous , retournant en arrière ,

LailFer entre eux &c nous une large carrière ;

Et déjà quelques-uns couroisnt épouvantés,

Jufques dans les vaiiTeaux qui les ont apportés.

Mais le dirai-je, ô Ciel ! Ralfurés par Pharnace ,

Et la honte en leurs cœurs réveillant leur audace ,

Ils reprennent courage , ils attaquent le roi.

Qu'un relie de foldars défendoit avec moi.

Qui pourroit exprimer par qu.ls faits incroyables ;

Quels coups , accompagnés de regards effroyables.

Son bras , fe lîgnalant pour la dernière fois ,

A de ce grand héros terminé les exploits ^

Enfin , las & couvert de fang & de pouflîère ,

Il s'étoit fait de morts une noble barrière.

Un autre bataillon s'eft avancé vers nous.

Les Romains, pour le joindre, ont fufpendu leurs coup5.

Ils vouloiens tous enfemble accabler Mithridate.

Mais lui : C'en efl ajfei , m'a-t-il dit , cher Arhate ,

Le fang 6* ma fureur m' emportent tro^ avant»

Ne livrons pasjîir-tout Mithrilate vivant.

Auffi-tôt dans Ton fein il plonge fon épée.

Mais la mort fuit encor fa grande ame trompée.

Ce héros dans mes bras eft tombé tout fanglant ,

Foible , & qui s^irritoit contre un trépas ii lent j

Et fe plaignant à moi de ce refte de vie ,

Il foulevoit encor fa main appefantie ,

Et , marquant à mon bras la place de fon cœur ;

Sembloit d'un coup plus fur implorer la faveur.

Tandis que , pofledé de ma douleur extrême ,

Je fongc bien plutôt à me percer moi-même ,

De grands cris ont foudain attiré mes regards.

J'ai vu , qui l'auroit cru ? J'ai vu de toutes parts

Vaincus ôc renverfés les Romains , Se Pharnace ,

Fuyant vers leurs vaifTeaux , abandonner la place '

Et le vainqueur , vers nous s'avançant de plus près ,

A mes yeux éperdus a montré Xipharès,

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