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Leandre.

Vous ne l'êtes que trop. Donnez-vous du repos,

Vous n'avez tantôt plus que la peau sur les os.

Dandin.

Du repos ? Ah ! sur toi tu veux régler ton père.
Crois-tu qu'un Juge n'ait qu'à faire bonne chère,
Qu'à battre le pavé comme un tas de Galans ;
Courir le bal la nuit, & le jour les brelans ?
L'argent ne nous vient pas si vite que l'on pense.
Chacun de tes rubans me coûte une sentence.
Ma robe vous fait honte, un fils de Juge ! Ah, fi !
Tu fais le Gentilhomme. Hé, Dandin, mon ami,
Regarde dans ma chambre, & dans ma garderobe,
Les portraits des Dandins. Tous ont porté la robe ;
Et c'est le bon parti. Compare prix pour prix.
Les étrennes d'un Juge à celles d'un Marquis ;
Attends que nous soyons à la fin de Décembre.
Qu'est-ce qu'un Gentilhomme ? Un pilier d'anti-chambre.
Combien en as-tu vus, je dis des plus hupés,
A souffler dans leurs doigts dans ma cour occupés,
Le manteau sur le nez, ou la main dans la poche ;
Enfin pour se chauffer, venir tourner ma broche.
Voilà comme on les traite. Hé, mon pauvre garçon,
De ta défunte mère est-ce là la leçon ?
La pauvre Babonnette ? Hélas ! lorsque j'y pense,
Elle ne manquoit pas une seule audience.
Jamais, au grand jamais, elle ne me quitta,
Et Dieu sait bien souvent ce qu'elle en rapporta :
Elle eût du Buvetier emporté les serviettes,
Plutôt que de rentrer au logis les mains nettes.
Et voilà comme on fait les bonnes maisons. Va,
Tu ne seras qu'un sot.

Leandre.

<poem> Vous vous morfondez-là, Mon père. Petit Jean, remenez votre maître, Couchez-le dans son lit ; fermez porte, fenêtre ; Qu'on barricade tout, afin qu'il ait plus chaud.