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Et quelle âme, dis-moi, ne serait éperdue Du coup dont ma raison vient d’être confondue ? Il épouse, dit-il, Hermione demain ; Il veut, pour m’honorer, la tenir de ma main. Ah ! plutôt cette main dans le sang du barbare…

Pylade

Vous l’accusez, Seigneur, de ce destin bizarre ; Cependant, tourmenté de ses propres desseins, Il est peut-être à plaindre autant que je vous plains.

Oreste

Non, non, je le connais, mon désespoir le flatte ; Sans moi, sans mon amour, il dédaignait l’ingrate ; Ses charmes jusque-là n’avaient pu le toucher : Le cruel ne la prend que pour me l’arracher. Ah dieux ! c’en était fait : Hermione gagnée Pour jamais de sa vue allait être éloignée, Son cœur, entre l’amour et le dépit confus, Pour se donner à moi n’attendait qu’un refus, Ses yeux s’ouvraient, Pylade, elle écoutait Oreste, Lui parlait, le plaignait… Un mot eût fait le reste.

Pylade

Vous le croyez !

Oreste
 xxxxxxxxxxxxxxxx Hé quoi ? ce courroux enflammé

Contre un ingrat…

Pylade
 xxxxxxxxxxxxxxxx Jamais il ne fut plus aimé.

Pensez-vous, quand Pyrrhus vous l’aurait accordée, Qu’un prétexte tout prêt ne l’eût pas retardée ? M’en croirez-vous ? Lassé de ses trompeurs attraits, Au lieu de l’enlever, fuyez-la pour jamais. Quoi ? votre amour se veut charger d’une furie Qui vous détestera, qui toute votre vie, Regrettant un hymen tout prêt à s’achever, Voudra…

Oreste
 xxxxxxxxxxxxxxxx C’est pour cela que je veux l’enlever.