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TRAGEDIE

Mais de mille remords ſon eſprit combattu
Croit tantoſt ſon amour, & tantoſt ſa vertu.
Il reſpecte en Pyrrhus l’honneur du diadéme.
Il reſpecte en Pyrrhus Achille, & Pyrrhus meſme.
Il craint les Grecs, il craint l’Vnivers en courroux.
Mais il ſe craint, dit-il, ſoy-meſme plus que tous.
Il voudroit en Vainqueur vous apporter ſa teſte.
Le ſeul nom d’Aſſaſſin l’épouuante & l’arreſte.
Enfin il eſt entré, ſans ſçauoir dans ſon cœur
S’il en deuoit ſortir Coupable, ou Spectateur.

HERMIONNE.

Non, non, il les verra triompher ſans obſtacle,
Il ſe gardera bien de troubler ce ſpectacle.
Ie ſçay de quels remords ſon courage eſt atteint.
Le laſche craint la mort, & c’eſt tout ce qu’il craint.
Quoy ? ſans qu’elle employaſt vne ſeule priere,
Ma Mere en ſa faueur arma la Grece entiere ?
Ses yeux pour leur querelle, en dix ans de combats,
Virent périr vingt Rois, qu’ils ne connoiſſoient pas ?
Et moy je ne prétens que la mort d’vn Parjure,
Et ie charge vn Amant du ſoin de mon injure,
Il peut me conquerir à ce prix, ſans danger,
Ie me liure moy-meſme, & ne puis me vanger ?
Allons. C’eſt à moy ſeule, à me rendre juſtice.
Que de cris de douleur le Temple retentiſſe.
De leur hymen fatal troublons l’euenement,
Et qu’ils ne ſoient vnis, s’il ſe peut, qu’vn moment.
Ie ne choisiray point dans ce deſordre extréme.
Tout me ſera Pyrrhus, fuſt-ce Oreſte luy-meſme,
Ie mourray. Mais au moins ma mort me vangera,
Ie ne mourray pas ſeule, & quelqu’vn me ſuiura.