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qu’ils fussent exclus eux seuls de la rédemption que Jésus-Christ avait méritée par sa mort à tous les hommes.

Ils commettaient impunément tous ces excès, et en tiraient un grand avantage, qui était de rendre odieux tous ceux qu’ils appelaient jansénistes à toutes les personnes qui n’étaient pas instruites à fond sur ces matières. Les mots mêmes de grâce efficace et de prédestination faisaient peur à toutes ces personnes, et ils regardaient comme suspects de l’hérésie des cinq propositions tous les livres et tous les sermons où ces mots étaient employés. Jusque-là qu’on raconte d’un prélat, ami des jésuites, homme fort peu éclairé, qu’étant entré dans le réfectoire d’une abbaye de son diocèse, et y ayant entendu lire ces paroles, qui renfermaient en elles tout le sens de la grâce efficace : C’est Dieu qui opère en nous le vouloir et le faire, il imposa silence au lecteur, et se fit apporter le livre pour l’examiner ; mais il fut assez surpris lorsqu’il trouva que c’étaient les Épîtres de saint Paul.

Les prétendus jansénistes avaient beau affirmer dans leurs écrits que Dieu ne commande point aux hommes des choses impossibles ; que non seulement on peut résister, mais qu’on résiste souvent à la grâce ; que Jésus-Christ est mort pour les réprouvés aussi bien que pour les justes, les jésuites soutenaient toujours que c’étaient des gens qui parlaient contre leur