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manière grave et touchante dont les louanges de Dieu y étaient chantées, la simplicité et la propreté de leur église, la modestie des domestiques, la solitude des parloirs, le peu d’empressement des religieuses à y soutenir la conversation, leur peu de curiosité pour savoir les choses du monde, et même les affaires de leurs proches ; en un mot, une entière indifférence pour tout ce qui ne regardait point Dieu. Combien les personnes qui connaissaient l’intérieur du monastère y trouvaient-elles de nouveaux sujets d’édification ! Quelle paix I quel silence ! quelle charité ! quel amour pour la pauvreté et la mortification ! Un travail sans relâche, une prière continuelle ; point d’ambition, que pour les emplois les plus vils et les plus humiliants ; aucune impatience dans les sœurs, nulle bizarrerie dans les mères, l’obéissance toujours prompte, et le commandement toujours raisonnable.

Mais rien n’approchait du parfait désintéressement qui régnait dans cette maison. Pendant plus de soixante ans qu’on y a reçu des religieuses, on n’y a jamais entendu parler ni de contrat ni de convention tacite pour la dot de celles qu’on recevait. On y éprouvait les novices pendant deux ans : si on leur trouvait une vocation véritable, les parents étaient avertis que leur fille était admise à la professionn, et l’on convenait avec eux du jour de la cérémonie. La profession faite, s’ils étaient riches, on recevait comme une aumône