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pour sa vertu l’estime que ne pouvaient lui refuser tous ceux qui le connaissaient, il ne fut pas plus tôt en faveur qu’il songea à l’élever aux premières dignités de l’Église. Il le fit pressentir sur l’évêché de Bayonne, qu’il lui destinait, et qui était le pays de sa naissance. Mais son extrême humilité, et cette espèce de sainte horreur qu’il eut toute sa vie pour les fonctions sublimes de l’épiscopat l’empêchèrent d’accepter cette offre. Ce fut le premier sujet de mécontentement que le cardinal eut contre lui.

Son second crime à son égard fut de passer pour n’approuver pas la doctrine que ce cardinal avait enseignée dans son Catéchisme de Luçon, touchant l’attrition formée parla seule crainte des peines, qu’il prétendait suffire pour la justification dans le sacrement de pénitence. Ce n’est pas que l’abbé de Saint-Cyran fût jamais entré dans aucune discussion sur cette matière, mais il ne laissait pas ignorer qu’il était persuadé que, sans aimer Dieu, le pécheur ne pouvait être justifié. Outre que le cardinal se piquait d’être encore plus grand théologien que grand politique, il était si dangereux de le contredire sur ce point particulier de l’attrition, que le père Seguenot, de l’Oratoire, fut mis à la Bastille pour avoir soutenu la nécessité de l’amour de Dieu dans la pénitence ; et que ce fut aussi pour le même sujet, à ce que l’on prétend, que le Père Caussin, confesseur du roi, fut disgracié.