ACTE I, SCENE I. a 9
Lorsqu'il se reposoit sur moi de tout l'état ; Que mon ordre au palais assembloit le sénat; Et que derrière un voile, invisible et présente , J'étois de ce grand corps Famé tuute-puissante. Des volontés de Rome alors mal assuré , Néron de sa grandeur n'étoit point enivré. Ce jour, ce triste jour frappe encor ma mémoire , Où Néron fut lui-même ébloui de sa gloire, Quand les ambassadeurs de tant de rois divers Vinrent le reconnoître au nom de l'univers. Sur son trône avec lui j'allois prendre ma place : J'ignore quel conseil prépara ma disgrâce; Quoi qu'il en soit , Néron , d'aussi loin qu'il me vit , Laissa sur son visage éclater son dépit. Mon cœur même en conçut un inalbeureux augure. L'ingrat, d'un faux respect colorant son injure , Se leva par avance; et, courant m'embrasser , Il m'écarta du trône où je m'allois placer. Depuis ce coup fatal , le pouvoir d'Agrippine Vers sa cbute à grands pas chaque jour s'achemine. L'ombre seule m'en reste; et l'on n'implore plus Que le nom de Sénèque et l'appui de Burrhus.
ALBINE.
Ah ! si de ce soupçon votre ame est prévenue, Pourquoi nourrissez-vous le venin qui vous tue? Daignez avec César vous éclaircir du moins.
AGRIFPINE.
César ne me voit plus , Albine, sans témoins : En public, à mon heure, on me donne audience. Sa réponse est dictée, et même son silence.
�� �