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lettres et docvments.

vn pont leuis iusques sus la concrescarpe du fossé.

Au iour susdit xiiii. de ce mois de Mars, le ciel & l’air semblerent fauoriser à la seste. Car lon n’auoit de long temps veu iournee tant claire, serene, & ioyeuse, comme icelle fut en toute sa duree. La frequence du peuple estoit incroyable. Car non seulement les Seigneurs Reuerendissimes Cardinaux presque tous, les Euesques, Prelatz, Officiers, Seigneurs, & Dames, & commun peuple de la ville y estoient accouruz : mais aussi des terres circunuoismes à plus de cinquante lieües à la ronde, estoient conuenuz nombre merueilleux de Seigneurs Ducz, Comtes, Barons, gentilzhommes, auecques leurs femmes & familles, au bruit qui estoit couru de ce nouueau tournoy : aussi qu’on auoit veu es iours precedens tous les brodeurs, tailleurs, recameurs, plumaciers, & autres de telz mestiers employez & occupez à parfaire les accoustremens requis à la feste. De mode que non les palais, maisons, loges, galeries, & eschauffautz seulement estoient pleins de gens en bien grande serre, quoy que la place soit des plus grandes & spacieuses qu’on voye : mais aussi les toitz & couuertures des maisons & eglises voisines. Au mylieu de la place pendoient les armoiries de mon dit Seigneur d’Orleans en bien grande marge à double face, entournoiees d’vn ioyeux feston de Myrtes, Lierres, Lauriers, & Orangiers mignonnement instrophiees d’or clinquant auecques ceste inscription :

Cresce infans, fatis nec te ipse vocantibus aufer.

Sus les xviii. heures, selon la supputation du païs, qui est entre vne & deux apres mydi, ce pendant que les combatans soy mettoient en armes, entrerent dedens