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discipline militaire, iamais ne fault mettre son ennemy au lieu de desespoir. Par ce que telle necessité luy multiplie la force, & acroist le couraige, qui ià estoit deiect & failly. Et n’y a meilleur remède de salut à gens estommiz & recreuz que de n’esperer salut aulcun. Quantes victoires ont estées tollues des mains des vaincqueurs par les vaincuz, quand ilz ne se sont contentez de raison : mais ont attempté du tout mettre à internition & destruire totalement leurs ennemys, sans en vouloir laisser un seul pour enporter les nouvelles ? Ouvrez touisours à voz ennemys toutes les portes & chemins, & plus tost leurs faictes un pont d’argent, affin de les renvoyer. Voyre mais (dist Gymnaste) ilz ont le Moyne. Ont ilz (dist Gargantua) le moyne ? Suz mon honneur, que ce sera à leur dommaige. Mais affin de survenir à tous azars, ne nous retirons pas encores, attendons icy en silence. Car ie pense ià assez congnoistre l’engin de noz ennemys, ils se guident par sort non par conseil. Iceulx ainsi attendens soubz les noiers, ce pendent le moyne poursuyvoit chocquant tous ceulx qu’il rencontroit sans de nully avoir mercy. Iusque à ce qu’il rencontra un chevalier qui portoit en crope un des pauvres pelerins. Et là le voulant mettre à sac s’escrya le pelerin. Ha monsieur le priour mon amy monsieur le priour saulvez moy