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ilz, ferons nous doncques ? Et donnerez leurs biens & terres, à ceulx qui vo’auront servy honnestement. La raison, dist il, le veult. C’est equité. Ie vous donne la Carmaigne, Surie, & toute Palestine. Ha, dirent ilz, Cyre, c’est du bien de vous : grand mercy. Dieu vous face bien prosperer. Là present estoit un vieux gentil homme esprové en divers hazars, & vray routier de guerre, nommé Echephron, lequel oyant ces propous dist. Iay grand peur que toute ceste entreprinse sera semblable à la farce du pot au laict, duquel un cordouannier se faisoit riche par resverie : puis le pot cassé n’eust de quoy disner. Que pretendez vous par ces belles conquestes ? Quelle sera la fin de tant de travaulx & traverses ? Ce sera, dist Picrochole, que repouserons à noz aises. Dont dit Echephron, & si par cas jamais n’en retournez ? Car le voyage est long & perilleux. Ne vault il pas mieulx que dès maintenant nous repousons, sans nous mettre en ces hazars ? O dist Spadassin, par dieu voicy un bon resveux, mais allons nous cacher au coing de la cheminée : & là passons avec les dames nostre temps, à enfiller des perles, ou à filler comme Sardanapalus. Qui ne se adventure n’a cheval ny mule. Ce dist Salomon. Qui trop (dist Echephron) se adventure perd cheval & mulle. Respondit Malcon.