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le vieux cévenol.

que cette puissante Société n’avait rien fait de plus grand, et surtout de plus adroit, que de faire expulser les protestants, qui connaissaient tous les souterrains de la politique ; on observa qu’il y en aurait pour un siècle avant que personne osât élever la voix contre une Société si redoutable et si habile dans ses vengeances… Ambroise, entendant alors quelque bruit, se hâta de gagner la porte qu’il ouvrit doucement. En se retirant chez lui, il ouït encore quelques conversations très échauffées, dans tous les coins de la rue ; une petite rumeur régnait dans la ville, comme la mer rend encore un mugissement sourd après que les vagues sont apaisées. L’événement de la journée fut longtemps le sujet des entretiens ; tout travail, durant plusieurs jours, fut

    le monde se souvient des scènes scandaleuses qui arrivèrent en France, dont les Jésuites étaient les auteurs, au sujet du refus des sacrements. L’évêque de ladite ville de Melun, M. de V…, esclave de l’opinion jésuitique, honnête homme d’ailleurs, croyant bonnement qu’il était de son devoir de ne pas céder sur ce point aux ordres supérieurs, ne voulut jamais permettre d’administrer l’abbé R…, janséniste malade, qui demandait les sacrements. L’évêque, pour avoir une excuse à son avis plausible, et pour ne pas se mettre dans le cas de se faire décréter, ordonna à son grand vicaire, l’abbé L…, de faire sa tournée dans toutes les paroisses, et de consommer toutes les hosties consacrées qu’il trouverait. Malheureusement, les ciboires étaient bien garnis, et le grand vicaire s’efforça de les consommer toutes : ce qui lui causa une indigestion si forte que le médecin, M. J…, eut bien de la peine à le tirer d’affaire sans lui donner l’émétique.