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diens, il sera tôt ou tard difficile à l’Angleterre de se maintenir dans l’Amérique du Nord ; mais d’autre part, sans le soutien de l’Angleterre, il eût été à peu près impossible, et il serait encore malaisé pour les Canadiens de se garantir, non-seulement contre la conquête, mais contre l’absorption américaine[1]. »

Pour notre compte, nous trouvons ces craintes excessives. Nous avons dit, dans une autre partie de cet ouvrage, pourquoi nous considérions que les Canadiens français auraient dû profiter de l’occasion inespérée qui s’offrait à eux, au temps de la guerre de l’indépendance, de s’affranchir de la domination anglaise et d’entrer, comme un État distinct et largement autonome, dans la confédération des États-Unis d’Amérique. Nous convenons qu’aujourd’hui les circonstances sont bien changées, puisque le lien de dépendance du Canada vis-à-vis de l’Angleterre est purement nominal et ne peut gêner la libre expansion du peuple canadien français ; tandis qu’un lien formé avec les États-Unis serait assez fort pour être quelquefois gênant. D’autre part, comme un très grand nombre de Canadiens français ont émigré et se sont établis aux États-Unis, notamment dans les États du Nord et de l’Ouest, il arrive que la frontière, une frontière assez arbitraire en somme, partage en deux tronçons, appelés à vivre sous deux drapeaux différents, une nationalité qui est une par l’origine, par les mœurs et par les aspirations. L’entrée du Canada dans l’Union ferait cesser cette séparation regrettable et fortifierait l’élément canadien-français en réu-

  1. Rameau. La France aux colonies, p. 245